La résistance

La résistance

Résistance

Qu’est-ce qu’une résistance ?

Tout d’abord, je vais préciser que dire “résistance” pour désigner le composant est un abus de langage. La résistance est ce qui le caractérise, et on devrait parler de dipôle résistif, de résistor ou encore de conducteur ohmique. Cependant, cet abus de langage (que je fais toujours moi-même, ce n’est pas bien) est profondément ancré dans les esprits et la littérature. J’emploierai donc le mot résistance à la fois pour désigner le composant et la caractéristique physique, lorsqu’il il n’y a pas trop d’ambiguïté possible.

La résistance est donc, comme son nom l’indique, un composant qui vient opposer une résistance électrique au courant qui le traverse. Nous verrons cela plus en détail par la suite.

La résistance électrique est communément notée R, et sa valeur est mesurée en ohm (Ω). Son symbole électrique est le suivant :

Les résistances se présentent sous différentes tailles et forme, selon la puissance qu’elles sont censées dissiper sous forme de chaleur.

Des résistances traversantes (Wikipedia)

Une résistance CMS (GM electronic)

Une très (très) grosse résistance de puissance (MPJA)

Elles peuvent donc prendre de nombreuses formes suivant leur usage. Remarquez sur l’image de gauche, la présence de traits colorés sur le boîtier des résistances. Il s’agit d’un code couleur qui permet de connaître leur valeur.

Le code couleur standardisé des résistances (Digikey)

D’un autre point de vue qu’un point de vue électrique, une résistance ne fait rien d’autre que de dissiper de l’énergie sous forme de chaleur. C’est pour cela que l’on utilise de longs fils métalliques dans les radiateurs qui font office de résistance de puissance, et qu’il est donc important de bien choisir le modèle de résistance suivant la puissance qu’elle doit dissiper sous peine d’avoir un émetteur de signaux … de fumée. 😅

À l’intérieur de la matière

Atomes et électrons : le modèle de Drude

On va commencer par rappeler deux petites choses : d’abord, le courant électrique est un flux d’électrons. Si l’électricité était de l’eau, alors le courant électrique en serait son débit. Ensuite, la matière (les fils de cuivre, ou dans ce qui nous intéresse ici les conducteurs ohmiques) est constituée d’atomes.

On peut partir d’un modèle historique assez simple mais qui fonctionne bien pour expliquer ce qui se passe dans un conducteur : le modèle de Drude. Les électrons sont des petites “billes” mobiles, qui subissent des chocs en percutant les atomes du conducteur, que l’on suppose fixes.

Illustration du modèle de Drude (source : Wikipédia)

Comme on peut le voir sur ce schéma, le champ électrique met en mouvement les électrons (en bleu), porteurs de charge. À notre échelle, ce champ sera plutôt une tension que l’on applique aux bornes du conducteur. Ceux-ci percutent, se frottent contre les atomes (en rouge). Tout cela crée une certaine difficulté à nos électrons, une … résistance !

Vers une définition à l’échelle microscopique de la résistance

Rassurez-vous, je vais vous épargner les calculs et les démonstrations pour le moment. Je vais me contenter d’expliquer les concepts derrière (et si le cœur vous en dit, voilà une bonne page qui en parle : http://olivier.granier.free.fr/Seq14/co/rappels-de-cours-statique-EB-loi-ohm_locale.html. Ce que je dirai par la suite est essentiellement un commentaire simplifié de ce qui est écrit).

Intéressons-nous d’abord à ce qui se passe pour un électron. On va quantifier ce qu’il subit : les frottements et l’attraction par le champ électrique. Puisque son déplacement est affecté par des forces qui le retiennent, il va mettre du temps à “démarrer”.

On se place dans le cas où notre électron est bien en mouvement : quand il a atteint sa vitesse de croisière en gros. En fait, on va tout simplement dire que l’on a dépassé ce temps. Rassurez-vous, dans le cas du cuivre on est sur des temps inférieurs à la nanoseconde … je crois que ça va pas changer grand chose de notre point de vue. 😅

Quand notre électron est “bien lancé”, ces forces restent tout le temps à la même valeur. Ça nous arrange bien ça ! On va pouvoir considérer que c’est la résistance … à l’échelle microscopique : cela s’appelle la conductivité (et son inverse se nomme la résistivité, pour ceux qui connaissent).

On peut donc, connaissant cette conductivité exprimer une version de la loi d’Ohm adaptée à cette toute petite échelle. Mais ça c’est bon pour les physiciens, nous on est là pour faire de l’électronique !

La loi d’Ohm

La loi d’Ohm … telle qu’on la connaît tous

Georg Ohm (1789 – 1854) (source : Wikipédia)

C’est l’heure de découper votre résistance en tout petits morceaux et de tout recoller ! 😅

Le principe peut paraître assez curieux à cause de sa relative simplicité. Pour passer de cette première version de la loi d’Ohm (dite loi d’Ohm locale), on va d’abord exprimer “les petits électrons qui se baladent” comme un courant électrique, un flux. L’idée est de tout simplement compter le nombre d’électrons qui circulent à travers une section du conducteur. Ensuite, on va “empiler” les différentes sections de conducteur qui possèdent chacune une certaine résistivité, jusqu’à obtenir la résistance de l’ensemble. Petit à petit, on se ramène finalement à notre échelle. Et enfin, après tout ces calculs fastidieux, on se ramène à cette formule bien connue :

U = R \cdot I

Cette formule constitue la caractéristique courant-tension de la résistance. Elle est importante, puisque c’est elle qui va nous permettre de se représenter ce qui lui arrive dans un circuit et ce qu’elle fait !

Un cas concret

Un grand classique, une résistance en série avec une LED (source : stompville.co.uk)

Intéressons-nous à un circuit, ou plutôt un petit morceau de circuit, bien connu de tous : une résistance en série avec une LED. Une LED possède un courant maximal qui lui serait destructeur ; il faut donc veiller à lui donner tout le temps un courant d’une valeur appropriée (on la choisit en général arbitrairement, mais on s’arrange toujours pour être en dessous des limites maximales évidemment).

Une des méthodes les plus simples est de mettre une résistance en série avec la LED. Encore faut-il en calculer une valeur appropriée !

Rassurez-vous, en général on connaît tout. On connaît la tension de la batterie : 9V. La tension aux bornes de la LED (on parle parfois de chute de tension) aussi : elle varie selon la couleur de la LED, et reste à peu près constante quelque soit le courant qui la traverse. Se référer au tableau suivant si besoin :

CouleurTension aux bornes en sens passant
(en anglais, Forward Voltage) en volts
Rouge1,7
Rouge (moderne à haute efficacité)2,0
Rouge clair2,3
Orange2,0
Jaune2,1
Vert2,2
Bleu3,2
Blanc3,2

Ensuite, la loi des mailles donne aussi la tension théorique aux bornes de la résistance :

U = 9 - U_{diode}

Où Udiode est donnée dans le tableau ci-dessus, selon votre couleur de LED. À partir de maintenant, tout est bon ! Il ne vous reste plus qu’à appliquer la loi d’Ohm.

R = \dfrac{9 - U_{diode}}{I}

Où I est le courant que l’on aura choisi arbitrairement au préalable.

Pour la fin des calculs, je vous laisse faire, il faut bien que je vous laisse travailler un peu, non mais oh ! 😂

Applications

Évidemment, la résistance toute seule ne semble se limiter qu’à être un simple dispositif de limitation de courant, voire une sorte de générateur de courant très sommaire … mais utilisée avec d’autres composants, elle peut avoir des applications qui vont bien plus loin que d’éviter vos LED de brûler !

Résistance de shunt

Montage qui n’en est pas un à proprement parler, car nous utilisons la résistance seule. Enfin, pas tout à fait. La résistance va nous servir de “capteur” de courant, et la tension à ses bornes est mesurée à l’aide d’un dispositif approprié (rappelez-vous, loi d’Ohm …), tel qu’un voltmètre, un amplificateur opérationnel … De ce fait, nous construisons un ampèremètre basique, la tension ainsi lue peut être traitée pour connaître le courant circulant dans le circuit.

Mesure du courant circulant dans le circuit formé d’une source de tension et d’une charge, grâce à un voltmètre et d’une résistance de shunt de faible valeur.

Si vous démontez un multimètre (à ne faire uniquement hors de toute source de tension !), vous remarquerez par ailleurs une sorte de gros fil métallique près des contacts de l’ampèremètre. Il s’agit ni plus ni moins de cette résistance de shunt.

Le fil métallique indiqué par la flèche rouge est la résistance de shunt (source : translatorscafe)

D’ailleurs, c’est bien pour ça que des durées de mesure maximales sont fixées pour l’ampèremètre : cette pauvre résistance peut chauffer à force de laisser passer un courant important ! De nos jours, on préfère ainsi utiliser pour les mesures permanentes de courants importants d’autres techniques, moins directes. Généralement, on mesure le champ magnétique rayonné par le courant qui circule (voir l’article sur la bobine) à l’aide d’un capteur à effet Hall.

Résistance de pull-up / pull-down

Si vous êtes familier des montages à base d’Arduino et autres circuits numériques, vous en avez forcément entendu parler un jour ou l’autre : elles sont souvent utilisées entre des capteurs en tout ou rien et le circuit intégré qui en traite le signal, ou entre deux composants travaillant avec des signaux en tout ou rien de façon plus globale. Il s’agit d’applications où les composants en question n’aiment pas avoir une “patte en l’air”, ce qui peut mener à des signaux erronés. Et là, ça peut être gênant !

Ce défaut est utilisé dans certains gadgets de type détecteur d’électricité statique. La grille du MOSFET reste en l’air et se retrouve chargée, ce qui le laisse passant. Le montage peut être réinitialisé en déchargeant ladite grille, ce qui rend le MOSFET bloquant. Mais pour nos composants qui commandent des MOSFET ou pour nos communications entre composants eux-mêmes formés de MOSFET, ça devient plus embêtant d’avoir un fonctionnement aussi hasardeux ! Il faut pouvoir décharger la grille lorsqu’on veut bloquer le transistor.

La solution à ce type de problème est donc d’insérer un composant capable de laisser à l’état haut ou à l’état bas, l’entrée du composant qui reçoit un signal, lorsque celui-ci est “à zéro”. L’option la plus simple est d’insérer une résistance dite de pull-up ou de pull-down, si celle-ci se situe respectivement entre le potentiel de l’état haut (typiquement 5V) et l’entrée, ou entre le potentiel de l’état bas (typiquement 0V) et l’entrée.

Ici une résistance de pull-up, en sortie d’un circuit intégré dit “en collecteur ouvert”. Elle permet d’apporter un courant modéré vers le composant suivant lorsque le transistor est bloqué. (Wikipédia)

Association série de résistances

Commençons tout d’abord par rappeler deux petites règles générales sur les associations de dipôles.

Des dipôles branchés en série, autrement dit les uns à la suite des autres, seront traversés par le même courant, quoi qu’il arrive ! S’ils sont branchés en parallèle (on dit aussi parfois en dérivation), ils possèdent la même tension à leurs bornes dans tout les cas.

Et ces deux règles nous seront nécessaires par la suite pour trouver la résistance équivalente de résistances en série ou en parallèle. Pour garder les choses simples, on va faire cela avec deux résistances. Mais cela fonctionne aussi bien avec un nombre infini de résistances (bon, là faut être un peu masochiste 🤭) !

Commençons donc par deux résistances en série. Elles sont donc traversées d’un même courant, mais la tension à leurs bornes n’est pas forcément la même. Loi d’Ohm oblige, elle est égale au produit du courant par leur valeur.

On retiendra donc que la résistance équivalente de deux résistances (ou plus) en série est égale à la somme de leurs valeurs. Plutôt intuitif non ?

Association parallèle de résistances

Les résistances en parallèles posent, quant à elles, un peu plus problème. 😅 Je dis ça car la formule finale un peu moins simple et intuitive.

Partons donc du constat suivant : les résistances sont en parallèles, elles possèdent donc toutes les mêmes tensions à leurs bornes. En revanche, le courant qui les traverse n’est pas forcément le même.

On retiendra dans ce cas que l’inverse de la résistance équivalente (aussi appelée conductance équivalente, G) est égale à la somme des inverses des résistances en parallèle (la somme des conductances) :

\dfrac{1}{R_{éq}} = \dfrac{1}{R_{1}} + \dfrac{1}{R_{1}} \iff G_{éq} = G_1 + G_2

Cette histoire de conductance n’est malgré tout pas très importante. Dans la pratique ça ne sert pas souvent. 😉

Bon voilà, je vous épargne le très classique exercice de physique du “cube” formé de résistances, dont il faut en déterminer la résistance équivalente. 😅 Mais libre à vous de le faire, c’est un bon exercice ! Nous allons plutôt voir ensuite deux montages utiles qui utilisent des associations de résistances.

Le pont diviseur de tension

Une très légère modification de la démonstration nécessaire au calcul de la résistance équivalente de deux résistances en série permet d’exprimer une tension en fonction des deux résistances et la tension aux bornes de l’ensemble R1 et R2.

Un pont diviseur de tension (Wikipédia)

Si le courant que l’on “tire” entre R1 et R2 est nul ou vraiment très faible (base d’un transistor de petits signaux, entrée d’un AOP, d’un Arduino …) ce montage est intéressant pour diminuer une tension, en électronique de signaux. On a ainsi la relation reliant U et Us, ainsi que R1 et R2 :

U_{s} = \dfrac{R_2}{R_1 + R_2} \cdot U

D’ailleurs, les potentiomètres sont des ponts diviseurs de tension réglables. Comme ils sont formés d’une piste conductrice sur laquelle vient glisser un curseur, on distingue deux résistances qui vont grossir ou diminuer selon la façon dont on le fait varier. Et on récupère bien la tension aux bornes d’une d’elles, on retrouve donc bien le schéma du pont diviseur !

Un potentiomètre, sa constitution et son schéma électrique (Source : arduino.developpez.com)

Le pont de Wheatstone

Le pont de Wheatstone (source : si.blaisepascal.fr)

Bon on ne va pas se mentir, il ne sert pas tout les 3 ou 4 matins. 😅 Je dois avouer n’en avoir jamais eu besoin dans la pratique, même si ça vaut le coup de ne pas passer ce montage sous silence. On ne sait jamais quand on en aura besoin, notamment avec des transducteurs dont la résistance interne varie peu (photorésistances, thermocouples …). Disons que c’est en quelque sorte une sorte de “pont diviseur amélioré” pour ce genre d’application. Je vous épargne les démonstrations pour ce montage qui est un peu plus gros et … qu’on voit assez rarement.

En considérant que R4 est la résistance de valeur inconnue, on a la relation suivante :

R_4 = \dfrac{R_2 \cdot V_e - (R_1 + R_2) \cdot V_s}{R_1 \cdot V_e + (R_1 + R_2) \cdot V_s} \cdot R_3

Oui, ça fait peur. Mais ce montage permet de détecter les variations très faibles de résistance car il permet de grandement les amplifier.

Pour ceux qui ont envie d’essayer par eux mêmes sans sortir de composants, voici une petite simulation interactive sur le site de l’université du Mans : http://ressources.univ-lemans.fr/AccesLibre/UM/Pedago/physique/02/electri/wheatstone.html.

À noter que le pont de Wheatstone a aussi deux petits frères, le pont de Sauty (avec des condensateurs) et le pont de Maxwell (avec des bobines). Mais ça, on en reparlera quand on verra les impédances. 😉

Conclusion

Et voilà, nous avons vu pas mal de choses sur les résistances. Nous avons vu que la résistance électrique est due à des forces qui freinent les électrons, ce qui à notre échelle revient à dire qu’elle freine le courant. Nous avons également pu voir différents montages qui mettent la résistance en action au sein d’un circuit, ce qui en fait un composant incontournable, malgré la simplicité de ses caractéristiques !

Cependant, on s’est intéressé à ce qui se passe seulement en courant continu. Le courant peut être freiné en courant alternatif de plusieurs façons différentes … mais nous verrons ça plus tard !

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