La bobine

Qu’est-ce qu’une bobine ?
Tout d’abord, je tiens à préciser que comme dans l’article sur le condensateur, je ne parlerai que de la bobine soumise à un courant continu. Pour ce qui se passe en courant alternatif (filtrage et impédances), c’est pour plus tard !
La bobine, aussi appelée solénoïde, inductance ou encore self, est un composant électronique passif. Avec la résistance et le condensateur, elle est le troisième membre de cette famille. Tout comme le condensateur, c’est un composant dit réactif, ce qui signifie qu’elle est capable de stocker de l’énergie et de la restituer. Dans le cas de la bobine, l’énergie est stockée sous la forme d’un champ magnétique.
La bobine est un composant caractérisé par son inductance, notée L et qui est exprimée en Henry (H).
Une bobine a, comme son nom l’indique, la forme d’un fil bobiné sur lui-même ! De ce fait, c’est un composant (ou un comportement) que l’on retrouve fréquemment, que ce soit dans des composants utilisés pour leur inductance ou des composants qui utilisent des bobinages (transformateurs, moteurs, électroaimants …).



Voici la représentation d’une bobine dans les schémas électrique. Comme vous pouvez le voir, il s’agit d’une représentation stylisée des enroulements de fil :

Comportement d’une bobine
Un petit électroaimant
On a vu dans les précédents articles qu’un courant électrique, c’est un flux d’électrons mis en mouvement, grâce à une différence de potentiel. Repensez à l’analogie hydraulique : si on considère qu’un tuyau d’eau est un fil électrique, la différence de potentiel est la différence de pression (crée par une pompe, par exemple). L’eau ainsi mise en mouvement a un débit, que l’on peut assimiler au courant électrique.
Mais l’électromagnétisme rajoute encore des choses ! Les électrons peuvent non seulement interagir avec des champs électriques, mais aussi les champs magnétiques, qui sont intimement liés. Sans rentrer dans les détails, sachez qu’un courant électrique circulant dans un fil génère un champ magnétique autour de ce dernier. Par exemple, on exploite ce phénomène dans les pinces ampèremétriques. En mesurant ce champ magnétique rayonné, on peut en déduire le courant circulant dans le fil. Courant électrique et champ magnétique rayonné sont liés grâce à une loi physique : le théorème d’Ampère. Son expression générale est beaucoup trop complexe pour cet article, mais retenez que le champ magnétique capté par la pince ampèremétrique est proportionnel au courant qui circule dans le fil et à une constante appelée perméabilité magnétique.
Mais le champ magnétique rayonné dans ce cas là est beaucoup trop faible pour stocker une quantité suffisante d’énergie. On peut créer un champ magnétique encore plus gros, en gardant le même courant, en bobinant le fil. On crée alors un solénoïde.

Remarque : certaines bobines possèdent un “noyau ferromagnétique”. Il s’agit généralement d’un petit bâton ou un tore de ferrite ou de fer doux, autour duquel le fil est enroulé, dont le but est de capter et de concentrer le champ magnétique rayonné par une bobine. Cela permet à la fois d’empêcher le champ magnétique qu’une bobine rayonne d’aller perturber celui de bobines voisines et d’augmenter l’inductance de celle-ci, sans pour autant avoir besoin de rajouter plus de tours de fil (ce qui est plus encombrant et plus cher !).
Et que se passe-t-il dans nos circuits ?
Mais le champ magnétique qui est crée dans ce cas là n’est pas bien stable : il n’aime pas beaucoup le courant électrique ! Il va chercher à produire son propre courant, qui va s’opposer à celui qui l’a crée. C’est ce que l’on appelle la loi de modération de Lenz.
Et c’est ce petit conflit entre champ électrique et magnétique qui est à l’origine du comportement de la bobine. La bobine est un composant qui n’aime pas les variations brusques de courant électrique, et va s’y opposer en le freinant, avec le phénomène évoqué ci-dessus. Mais une fois qu’il ne varie plus, ce n’est pas beaucoup plus différent qu’un fil : le courant y circule normalement. Ce qui nous mène à la caractéristique courant-tension de la bobine :
U(t) = L\cdot \dfrac{\mathrm d I(t)}{\mathrm d t}
Avec U la tension aux bornes de la bobine, L l’inductance de la bobine et dI/dt la variation au cours du temps du courant circulant dans la bobine. Cela ne vous rappelle rien ? Et oui, la bobine est un peu un complémentaire du condensateur, pour ce qui est du courant !
La bobine en action
Une bobine soumise à un courant
Commençons les choses en douceur (même si tout reste relatif, je vous l’accorde 😅). On va reprendre le circuit RC décrit dans l’article sur le condensateur, sauf qu’on le remplace par une bobine. On parle alors de circuit RL. Regardons d’abord ce qui se passe au moment où l’on allume la source de tension.

Et ce circuit est régi par l’équation différentielle suivante :
U(t) = L \cdot \dfrac{\mathrm dI(t)}{\mathrm dt} + R \cdot I(t)
Bref, si vous sortez de l’article sur le condensateur, tout cela ne devrait pas vous paraître trop différent ! La solution aura la même allure et la constante de temps du circuit est juste légèrement différente :
\tau = \dfrac{L}{R}
En guise de preuve de ce qui se passe, voici ce que j’ai obtenu à l’oscilloscope en reproduisant le même circuit pour de vrai. Comme vous pouvez le voir, c’est très proche de ce que l’on a pu obtenir avec le condensateur ! Oui, vers la fin la tension diminue un peu … il n’y a pas de composant parfait !

Quel est l’intérêt d’un tel circuit dans la pratique ? Pas pour servir de temporisation, on n’a pas autant de souplesse qu’avec un condensateur et une bobine n’est pas capable de rester chargée une fois qu’on ne l’alimente plus. Par contre, il trouve des usages en électronique de puissance : soit pour freiner une forte variation de courant, qui risquerait d’être destructrice pour d’autres composants, ou encore dans certains convertisseurs de tension (Buck et Boost, qui feront probablement l’objet d’articles à venir).
Avec un condensateur en plus
Que se passe-t-il lorsque l’on rajoute un condensateur au circuit précédent ? Ce circuit trouve plus d’usages en pratique que le précédent, mais … il est beaucoup, beaucoup plus complexe ! Voyons un peu le circuit que l’on a. On l’appelle le circuit RLC série :

Si l’on s’intéresse aux maths derrière ce circuit, ça fait encore plus peur que le circuit précédent (en tout cas, cette équation me donne toujours quelques sueurs froides 😅). On a affaire cette fois à une équation différentielle du second ordre, dont je vous épargnerai l’expression pour simplifier.
Ces équations sont sensiblement les mêmes que celles qui régissent celles d’un système qui vous paraîtra plus familier : un masse attachée à un ressort. Quand vous tirez la masse, le ressort s’allonge, et quand vous la relâchez, le ressort tend à retrouver sa position initiale. Que se passe-t-il ? Et bien on retrouve 2 cas de figure (en réalité il y en a 3, mais l’un de ces cas est quasi-impossible à obtenir dans la vraie vie), qui dépendent de pas mal de paramètres :
- il revient de façon exponentielle à la position de départ, sans osciller (régime apériodique);
- il revient à la position de départ, en oscillant (régime pseudo-périodique).

Il se passe la même chose pour un circuit RLC. Nous n’allons pas rentrer dans le détail des solutions et autres maths, restons à l’essentiel ! Introduisons une grandeur nommée facteur d’amortissement m, d’expression :
m = \dfrac {R}{2L}
On peut aussi exprimer le facteur de qualité Q :
Q = \dfrac {1}{2m}
Plus m est grand, plus le système est amorti et moins il a de chances d’osciller. De même, plus Q est grand, moins le système est amorti et plus il a de chances d’osciller. Et vice versa.
Et on a une règle qui nous permet ainsi de prédire dans quel cas de figure on va se placer :
- Si Q < 0,5, le système n’oscille pas.
- Si Q > 0,5, le système oscille.
Le circuit RLC est très souvent présent en électronique, et on le retrouvera d’ailleurs dans d’autres articles ! Et il peut ainsi être utile de connaître l’expression de m ou de Q : parfois on veut qu’il oscille, d’autres fois non !
D’ailleurs, dans le cas où le circuit oscille, la fréquence de ces oscillations est donnée par la formule suivante :
f_0 = \dfrac {1}{2\pi\sqrt{LC}}
C’est tout pour les maths de ce circuit bien méchant ! Ne vous inquiétez pas, je reviendrai sur ce circuit dans des articles ultérieurs et vous pourrez en voir quelques applications pratiques.
Un dernier point sur le circuit RL !
Attendez une peu … on a dit que la bobine freine les variations brusques de courant. Elle donne plus de difficultés au courant à passer. Et comme la tension est une force électromotrice, les électrons ont besoin de plus de “force” pour bouger : la tension aux bornes de la bobine ne peut qu’augmenter !
La caractéristique courant-tension de la bobine nous dit la même chose d’un aspect mathématique : plus le courant varie vite, plus le dI/dt est important et plus la tension aux bornes de la bobine est grande. Mais alors … a-t-on une surtension aux bornes de la bobine ?
Une petite analogie simple ! Imaginez que votre bobine est un ressort (je dis pas ça car ça y ressemble parfois hein ! 😝), sur lequel vous pouvez appuyer. La longueur du ressort représente la tension aux bornes de la bobine, la force avec laquelle vous appuyez dessus est le courant.
On ferme le circuit RL ; vous appuyez d’un coup sur le ressort ! Celui-ci va se comprimer, mais en contrepartie réagir en vous renvoyant une force. Ça vous demande plus d’efforts pour comprimer le ressort, et le ressort accumule de l’énergie (à l’image de la bobine), pour se remettre à sa longueur au repos.
On rouvre le circuit RL : vous sortez d’un coup votre main ! Le ressort reprend sa forme de départ brutalement, et même parfois sauter ! Il libère toute l’énergie qu’il a accumulé avec violence, car il n’aime pas se sentir “chargé”. C’est ce qui se passe avec la bobine : dans cette situation, une forte tension négative apparaît aux bornes de la bobine pendant un très court instant, mais suffisant pour créer une étincelle dans un interrupteur, ou même griller un transistor qui pilote un moteur ou un relais par exemple.
Pour justement protéger ces transistors qui risqueraient de se prendre une méchante surtension, on utilise en général une diode de roue libre. Cette technique consiste à mettre en parallèle au bobinage une diode :

J’expliquerai plus en détail le principe de cette méthode dans le futur article consacrée aux diodes.
Cet effet de surtension est quand même utilisé dans certains cas ! Le convertisseur Boost (qui convertit une tension continue vers une autre plus élevée) utilise une bobine dans ce but là précisément. Et ne vous êtes vous jamais demandé pourquoi les vieux tubes fluocompacts clignotaient plusieurs fois à l’allumage ? Ils nécessitent une haute tension au démarrage pour vaporiser le mercure qu’ils contiennent. Ce petit “coup de fouet” est donné justement par un circuit RL qui se charge et se décharge d’un coup, formé par le ballast (une grosse bobine) et le starter (une sorte d’interrupteur qui va s’ouvrir et se fermer tout seul).
Et ce n’est pas fini !
Voilà pour cette petite introduction aux bobines ! Je pourrai bien continuer davantage, mais afin de ne pas vous embobiner, je garderai des articles plus poussés sur les applications des bobines pour plus tard. Mais, je l’espère, vous êtes déjà bien armés pour voir la suite … sans sacs de nœuds ! 😉
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